
J’ai rencontré Fanny sur la Promenade des Anglais, à Nice, à l’arrivée de la Three Peaks Bike Race où elle a fini 14ème au général et première femme.
Alors que la plupart des compétiteurs roulaient sur des vélos de course en carbone, Fanny est arrivée de Vienne sur son magnifique vélo en acier soudobrasé.
Dans le podcast que nous avons enregistré sur la plage, elle a admis être plus à l’aise pour rouler que pour expliquer le montage de son vélo. Une bonne occasion pour discuter avec Julien, le fondateur de Jolie Rouge.
Salut Julien ! Magnifique vélo, Fanny a été bien inspirée de venir vers toi !
Pas du tout ! En fait c’est moi qui suis allé vers elle.
Je m’étais dit « quitte à avoir ma petite marque de vélos, autant faire comme les grands et avoir une pilote. » C’était un kif.
Personnellement, je viens du vélo de voyage et du VTT. J’aime le monde du vélo longue distance mais je ne peux pas le pratiquer au point de créer du contenu, et Fanny offre ça. C’est venu naturellement.
Je voulais quelqu’un qui ne montre pas les bras directement, qui corresponde à ma vision des choses.
Quelqu’un qui jetterait ses power gels sur le bas-côté, je ne voudrais pas le sponsoriser.
On a pris une petite année pour construire son vélo.
A l’époque où on a commencé à parler, il y a deux ans maintenant, elle ne se lançait pas, mais presque! Ca faisait trois ans qu’elle faisait du vélo. Je ne la connaissais pas en mode si hargneuse, elle m’impressionne !

Imaginez que vous êtes enfant.
Vos parents vous offrent une boîte d’allumettes en disant « Attention, ce n’est pas bien de mettre le feu ! »
A qui reviendra la faute quand la maison aura brûlé ?
Pourra-t-on légitimement incriminer l’enfant ?
Les parents savent ce qui est bon pour leur enfant et agissent en conséquence, même si certains enfants font des crises de colère.
Ils sont responsables de la maison, de l’enfant et des jouets qu’ils lui donnent.
De la même manière, l’état est responsable de ce qu’il autorise dans son pays.
Autoriser le suremballage, les voitures de 2 tonnes ou les vols nationaux, c’est comme confier des allumettes à son enfant en espérant qu’il ne s’en serve pas.
Si votre gouvernement n’est pas capable de protéger votre santé et notre planète, il est temps d’en changer.
Evanoui soutient

En quoi ce vélo est-il spécial ?
On est partis sur un vélo clairement orienté longue distance : confortable mais réactif.
Bon, on adapte quand même le vélo à la personne : si on fait un vélo pour Sofiane (Sehili, vainqueur de multiples courses longue distance, NDLR), il faut que ce soit un vélo qui roule à 35km/h de moyenne !
Le point fort de Fanny, c’est qu’elle reste longtemps en selle. Elle roule fort oui, mais surtout elle ne descend pas du vélo.
Alors objectif les objectifs étaient clairement :
- Rester sur la selle
- La sécurité.
Donc des lumières -même si ça ne suffit jamais- et un vélo sécurisant, sur lequel on n’ait pas peur :
- Grande chasse
- Un peu plus d’empattement
- Un angle de fourche un peu plus fort pour être à l’aise dans les descentes.
- Un vélo plus stable sur l’aspect roulant, au dessus des 25-30km/h, même si on perd un peu en réactivité.
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C’est la grosse différence avec un vélo de route typé vitesse.
On a vraiment mis tous les curseurs de l’autre côté, tout en restant sur un vélo de route performant sans basculer dans la randonneuse.


Quels tubes as-tu utilisés ?
Le vélo est entièrement en Colombus Life. J’aurais pu partir sur du Spirit, vu que les propriétés mécaniques sont les mêmes, surtout que Fanny est un petit gabarit, elle ne saute pas de trottoirs etc… Et puis le Life supporte mieux d’être chargé.
Une fois de plus, on a misé sur la fiabilité, c’est un vélo qui est fait pour être gardé.
Tu nous parles un peu du choix de pièces ?
Pneus en 30mm. Elle peut mettre du 36 si besoin, même si je suis sûr qu’elle ne le fera pas !
Transmission : elle m’a toujours dit que la transmission de son Genesis lui convenait. Du coup je lui ai mis la même cassette 11-32 avec un pédalier 50/34. Ca lui va toujours mais elle m’a demandé de lui envoyer une cassette un peu plus grande.
Clairement quand tu fais 2000km avec presque 30 000m de dénivelé, ce serait bienvenu. J’aurais dû lui imposer !
Alors effectivement elle a passé tous les cols de la 3PBR, mais c’était clairement au mental.
J’ai plein d’idées pour les vélos longue distance, des petits porte-sacoches discrets et lights… Mais elle voulait rester sur quelque chose de plutôt simple, c’est pourquoi on est restés sur les sacoches de bikepacking.
Je pense quand même lui rajouter une sacoche de top tube le jour où le vélo revient à l’atelier.


D’où vient ce feu arrière ? Son intégration est super originale !
Je me suis offert une petite commande CNC ! Tu dessines la coquille du phare dans l’ordi et ça te la sort sans rien faire !
Je fais de plus en plus de pièces comme ça à l’atelier, les coupelles de boitier de pédalier, les renforts de douille de direction, bientôt les dropouts…
Je suis presque prêt à faire du 100% France. C’était un petit caprice de ma part !

J’imagine que tu es fier de produire ces pièces maison !
Oui, je fais partie de ceux qui aiment ce genre de détails, comme Rizzo qui fait ses propres œillets de porte-bidons ou colerettes de douille de direction.
Les cadreurs aujourd’hui n’ont que deux choix : soit tu achètes chez Ceeway (Production asiatique. C’est bien mais on peut faire de la meilleure qualité), soit chez Paragon ; Ce sont de super pièces mais on ne se différencie pas les uns des autres, c’est dommage. Sans compter que c’est assez cher à cause des taxes américaines.
Le Jolie Rouge de Fanny
• Cadre en Colombus Life
• Fourche : Colombus Futura
• Manettes : Shimano Ultegra
• Freins : Ultegra hydraulic
• Pédalier : White Ind. 50/34
• Moyeu AR : White Ind.
• Moyeu AV : Dynamo Son 28
• Jantes : DT Swiss RR421
• Sacoches : Helmut Equipement
• Jeu de direction : White Ind.
• Phare avant : Sinewave
• Dérailleurs : Ultegra
• Potence : Thomson X2
• Tige de selle : Thomson Masterpiece
• Selle : Ergon SR pro women
• Prologateurs : 3T Ultimate Performance

Le magnifique serrage de selle en tulipe
Fanny m’a dit que c’est une de tes premières peintures, c’est magnifique !
C’est pas non plus la toute première, j’en avais déjà faites plusieurs pour des copains. J’aime bien le rendu mais pour le moment la solidité n’est pas encore folle, je travaille dessus. Pour l’instant ça n’est pas encore vendable.
Il faut encore que je m’améliore sur les peintures. Au début, tu essaies de gérer les soudures, puis les études posturales, la relation clients… Là j’en suis à gérer les peintures. Ca m’éclate, la peinture, c’est vraiment cool!

C’est rare de voir un cadreur peindre, en général on sous-traite avec quelqu’un dont c’est le métier…
C’est vrai qu’en France on sous-traite tous la peinture chez Cyfac ou chez Victoire.
J’ai un peintre qui fait de la belle peinture epoxy en poudre ; C’est plus pour les personnes qui ont tendance à ne pas être très soigneuses, pour les vélos de voyage. C’est plus solide.

En tant que pilote et fan des pionners de l’aéropostale, Fanny a tenu à faire peindre des biplans sur son vélo.
Mon utopie pour les cadreurs français, ce serait qu’il y en ait un ou deux dans chaque grande ville.
Quand tu rencontres un cycliste en haut du col, tu vois des machines de différents cadreurs, avec de petites subtilités…
Comment vois-tu l’avenir du métier ?
La production française va revenir. On voit bien que le métier revient. On est tous contents de ça, y’a de la place pour tout le monde et on arrivera tous ensemble à faire des trucs chouettes !
Sans être trop matérialiste, parce qu’on est là pour rouler, profiter et s’amuser, c’est quand même plus agréable de voir le vélo du cadreur de Clermont-Ferrand qui rencontre celui d’une autre ville…
Ce serait vraiment agréable pour notre petite communauté.
Même si le vélo reste conventionnel, un cadreur artisanal offre une vraie valeur ajoutée. Il y a toujours une histoire derrière.

Pour suivre Jolie Rouge
www.jolierougecycles.fr
@jolierougecycles
Pour suivre Fanny
fannybens.blogspot.com
@fannybens Fanny Bensussan