Calum Munro ne s’attendait pas à vivre une expérience si intense et variée lors du Torino-Nice Rally.

Ce voyage l’a tellement marqué qu’il a décidé d’en partager l’esprit en créant son propre parcours chez lui, en Ecosse : le Roam Scotland Rally.

Passion

Ernesto était en avance sur moi avant même le premier tour de roue, sur la place Giambattista Bodoni.

« Tous ces gens qui viennent de pays différents pour rouler ensemble, c’est tellement beau.
Je crois que je vais pleurer aujourd’hui. »

Moi qui pensais être émotif, c’était là la vraie passion latine !

Voici comment j’en suis arrivé au même point, sept jours après, à Nice.

L’acharnement

Il y a une minute, l’acide lactique me brûlait les jambes. Je m’applique à reprendre mon souffle et le picotement typique de l’hyperventilation commence à disparaître. Je souffre déjà. En arrivant en altitude, il est remplacé par de l’appréhension avec les nuages qui vont et viennent, plongeant par alternance la vertigineuse descente dans l’obscurité. C’est le jour 1 sur le Colombardo.

C’est aussi le jour où j’ai rencontré Tobias, un Allemand génial. Il était chargé.
Toute la semaine, on a échangé de brèves conversations en roulant. Je finissais par le dépasser, pour le voir réapparaître mystérieusement devant moi un peu plus tard ou le lendemain, déterminé, s’acharnant avec patience à faire tourner ses pédales.
J’ai fini par me demander s’il s’arrêtait de temps en temps. Avait-il trouvé la cadence parfaite, celle qui permettait à ce moteur diesel de tourner en continu? Mais lui aussi était en souffrance.

La souffrance

Cette histoire de souffrance me rend perplexe. J’ai traîné mon Shand Stooshie par delà 14 500m entre Turin et Nice. Au matin du sixième jour, j’ai enfilé mon cuissard et ai dû m’asseoir pour prendre le temps de me recentrer, de rassembler mes forces.
Quelques heures plus tard, j’atteignais le Col de Tende, arborant le sourire grimaçant d’un homme qui se sent tellement vivant qu’il ne peut pas s’en empêcher.

Quel plaisir de découvrir de nouveaux paysages à vélo ! Le dépaysement, l’air frais, la nourriture…

 

Et souvent, on n’a pas besoin de traverser la planète pour profiter de ces différentes ambiances !

L’Europe est suffisamment variée pour trouver son plaisir, avec ses forêts, ses montagnes, ses côtes littorales et même ses déserts. On le sait, l’avion et la voiture sont les moyens de transport les plus polluants, il est pourtant facile de réduire notre empreinte carbone avec autant à voir chez nous en Europe.

Rendez votre prochain voyage plus écolo, roulez à la découverte de votre région ou mettez votre vélo dans le train pour partir plus loin. Si vous devez y aller en voiture, co-voiturez avec des amis !

 

A-t-on besoin de voyager si loin si souvent ?
Préservons le côté exceptionnel du grand voyage, et profitons des lieux à portée de roues !

Quelle sorte de folie est-ce là?

Un amuse-bouche de danger,
une entrée de paysages spectaculaires,
un hors d’œuvre d’inconfort qui résonne dans tout le corps
et un dessert -curieusement plaisant- d’épuisement.

En tant que psychothérapeute, il peut sembler étrange que je recherche la douleur. Pourtant je sais que la peur, par exemple, est nécessaire. Sans elle, on se ferait renverser en traversant la route.
Il est rare que mes patients soient anxieux à propos de risques physiques, ce sont les menaces d’inadaptation sociale ou la peur du rejet qui les perturbent.
L’aspect direct de la gêne physique serait-il parfois réconfortant?

Col Agnel

J’étais rincé, mordant le guidon à chaque coup de pédale lorsque Rainer me rattrapa, ralentit et ajusta sa cadence à la mienne pour discuter.
Dans un état second, entre les moments où je rêvais de me blottir dans mon sac de couchage au bord de la route et les rares instants de vue lucide de la crête qui découpait le ciel devant moi, des images de saint-bernards me reviennent vaguement. En avons-nous parlé? Rainer, tu m’as sauvé, ce jour là.  Merci mec. J’aurais été cuit sans toi.

Ma femme Harriet avait survolé l’Agnel comme une Diane des temps modernes, déesse des montagnes et des forêts, portée par des nymphes jusqu’au sommet. Je l’y ai trouvée accompagnée d’un petit groupe de compadres qui partagaient le sentiment d’accomplissement de l’ascension conquise, agrémenté d’un petit remontant directement à la flasque.

Ah le Bruichladdich de 10 ans, tu n’as jamais été aussi bon que ce jour là, bel élixir doré !

Les grands espaces

Nous étions seuls sur l’altiplano du « Petit Pérou », juste moi, ma déesse, des vaches et quelques marmottes.

Cette sensation d’espace, c’était comme un grand angle sur la vie.

Nous étions insignifiants, mais c’était bien de n’être que de petits points dans cette immensité. Mieux : c’était fabuleux.
L’esprit du TNR faisait son chemin en moi.

Ne me méprenez pas, tout n’était pas rose avec la déesse.
Le troisième jour, en arrivant à Briançon, j’ai touché le fond en lui envoyant « Si tu croyais vraiment en l’égalité des sexes, tu porterais la moitié de tout ce bazar! »

La camaraderie

Malgré cela, la camaraderie avec nos compagnons de route grandissait. Comme avec Filippo, que nous avions rencontré au dîner la veille du départ, à Turin. A chaque fois qu’on le croisait, son enthousiasme contagieux nous tirait vers le haut. Peut-être était-ce la simple nécessité d’aller d’un point A à un point B, trouver de quoi se nourrir et s’encourager?

Il y avait un sentiment partagé de satisfaction et une générosité de l’esprit rare.

L’alchimie

Ernesto avait certes pris de l’avance sur le parcours émotionnel du TNR, mais j’ai fini par en arriver au même point.
Le TNR a été un antidote à la compétition, au perfectionnisme, à la jalousie, la colère et l’intolérance de notre montre numérique, ces forces qui doucement mais sûrement nous déconnectent les uns des autres et de la nature.

Même philosophie, lieu différent: le Roam Scotland Rally

Vagabondage en Ecosse

Le « droit d’accès à la nature » est inscrit dans nos lois. Le rally serpente à travers l’Ecosse, offrant des possibilités de détours autant aux cabris avides de montagnes qu’aux rouleurs pépères. Chaque année, le parcours abordera de nouveaux territoires.

Définition : Vagabonder (verbe) Errer çà et là, à l’aventure, sans but précis, généralement dans de grands espaces.

En résumé

  • Où: Edimburgh – Inverness
  • Quand:  Dim. 5 mai 2019, 9h
  • Quoi:   Bikepacking sans assistance
  • Distance: de 533 à 920km
  • Dénivelée +: De 5759m à 14029m
  • Prix : Gratuit !
  • Inscription :  Roam Scotland Rally Facebook page

Météo

Le mois de mai est la période optimale. La température moyenne avoisine les 15°. C’est le mois où il pleut le moins, mais ça reste humide et venteux ! L’année dernière il faisait autour des 20° mais il peut toujours neiger en altitude. Un équipement chaud et imperméable est indispensable.

Comment venir

De nombreux vols et trains mènent à Edimbourg et les possibilités de logement y sont nombreuses en mai.
Inverness propose un petit aéroport et des trains directs pour Edimbourg.

Dormir, manger

Les emplacements pour camper ou bivouaquer sont nombreux, si le temps le permet. Le parcours va de campings en refuges, hôtels de jeunesse, chambres d’hôtes et hôtels. Les occasions de faire des courses sont fréquentes, même si quelques longues sections isolées demandent un peu d’organisation.

Partez prendre l’air de temps en temps. Gravissez une montagne ou passez une semaine dans les bois.

Nettoyez votre esprit.

John Muir

Mon voyage du TNR au RSR a réellement commencé quand j’avais 11 ans, avec mon Puch Pacemaker à 5 vitesses et mon père qui portait tout le matériel.

Photo: Alan Munro
Photo: Alan Munro

Le voyage à vélo, un cadeau pour la vie.
Merci papa !

Photos Alan Munro [Ben Wyvis, 1982]

Le premier Roam Scotland Rally décolle en mai 2019. Rejoignez-nous l’année prochaine !